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Transition écologique : impasse ou solution aux enjeux sociaux ?


“Bon, les écolos ! N’en avez-vous pas marre de ne penser qu’aux abeilles et aux ours polaires ? Ne pensez-vous pas qu’il faudrait se préoccuper des vrais sujets comme les tensions géopolitiques, le pouvoir d’achat ou les inégalités ??!”



Il est vrai que l’écologie, c’est préserver les papillons, les vers de terre et les coquelicots. Mais c’est légèrement réducteur car notre environnement dans son ensemble conditionne l’habitabilité de la planète pour les humains et assure des services écosystémiques comme l’eau propre, la génération d’oxygène et la régulation des maladies ! Donc peut-être que préserver l’environnement est une priorité sociale.


“C’est vrai, agir pour préserver l’environnement, c’est important. Mais à quel prix !? Seuls les riches ont les moyens d’être écolos ! On le voit bien avec les Gilets Jaunes !”


Et pourtant, certaines actions très simples sur le papier comme manger moins de viande, c’est accessible à tous et toutes, c’est bon pour la santé au regard de la consommation moyenne actuelle selon l’OMS, et c’est moins cher. Est-ce si incompatible de concilier action écologique et action à bénéfice social ?


Dans cet article, on vous expose notre point de vue en 2 parties, appuyé d’exemples, de chiffres et de sources !


Pas de planète, pas d’humains. Pas d’humains, pas d’enjeux sociaux !


Avant de commencer, les enjeux sociaux sont nombreux et divers : accès aux ressources (alimentation, eau potable, énergie…), accès à certains services (éducation, santé…), inclusivité et équité, souveraineté…


Plusieurs approches existent sur la définition de l’ensemble des enjeux sociaux et leur décomposition : Les 17 Objectifs de Développement Durable (ODDs), ou les 12 bases du plancher social du donut de la théorie de Kate Raworth (en savoir plus sur le donut).


Ces décompositions sont différentes mais recouvrent un ensemble d’enjeux très proches (d’ailleurs les ODDs se sont inspirés de la théorie du donut en 2015, puis Kate Raworth s’est à son tour inspirée des ODDs pour mettre à jour la décomposition du plancher social).


De plus, la priorisation entre ces différents enjeux peut être largement discutée. Par exemple, entre les indicateurs du plancher social, la liste des enjeux d’actualité de l’ONU pour son 75e anniversaire ou encore les sondages d’opinion en France, il y a de nombreuses différences ! Mais nous ne rentrerons pas dans la comparaison des enjeux, les considérerons comme tous importants dans leur ensemble.


Tout d’abord, rappelons l’évidence : les crises environnementales renforcent ou créent les problèmes sociaux.


Détruire notre environnement, ce n’est pas uniquement détruire les habitats naturels d’animaux, ou faire disparaître des espèces, c’est aussi dégrader les conditions d’habitabilité de la planète pour nous, les êtres humains. Prenons quelques exemples.


Le changement climatique a de multiples conséquences, comme...


  • L’élévation du niveau des océans : certaines zones sont très vulnérables et risquent d’être inondées dès 2100, même avec une élévation de température de +1,5°. Par exemple, les Pays-Bas seront à moitié inondés selon Climate Central.


  • La baisse des rendements agricoles : le GIEC estime que les rendements des cultures de maïs et de soja vont respectivement baisser de 0,23%/an et 0,33%/an, ce qui représente des évolutions majeures sur plusieurs décennies (AR6, WGII, chap5).

L’extinction de la biodiversité a elle aussi des conséquences, comme la baisse des ressources de poissons : l’IPBES prévoit une diminution de la biomasse de poissons d'ici la fin du siècle dans les scénarios de réchauffement climatique bas et haut d’entre 3 et 25%. En plus des conséquences sur l’accès à l’alimentation, plus de 90% des pêcheurs professionnels font de la “pêche à petite échelle”, et sont particulièrement vulnérables économiquement à une baisse significative des ressources.


Prenons un dernier exemple : l’approvisionnement en matières premières. En effet, certaines ressources sont limitées (fossiles, métaux) et cela peut prendre des proportions géopolitiques majeures car les économies dépendent fortement de certains de ces matériaux. Par exemple concernant le pétrole, The Shift Project a analysé l’approvisionnement de l’UE et identifié que beaucoup de nos fournisseurs auraient des productions en déclin dans les prochaines années. Et le think thank questionne sur le comportement de ces pays lorsque cela arrivera, et explique que si nous gardons un même niveau de dépendance de leurs productions, nous risquons d’être fortement vulnérables envers eux. Notre souveraineté sur certains autres matériaux (uranium, métaux critiques nécessaires aux technologies bas carbone…) questionne.


Dégrader l’environnement a donc de nombreuses conséquences sociales et crée et renforce les enjeux sociaux : Comment résoudre les problèmes d’accès à l’alimentation dans un monde où il est plus difficile de produire de la nourriture ? Comment résoudre les problèmes d’accès à l’eau dans un monde plus sec ? Comment garantir un logement digne pour tous dans un monde où des métropoles, des villes et des villages sont inondés ?


La dégradation forte des conditions d’habitabilité va générer des mouvements migratoires : De nombreuses personnes vont devoir changer de village, de région, voire de pays. Les chiffres varient selon les sources, par exemple selon la Banque Mondiale, ce sont 216 millions de personnes qui vont devoir se déplacer dans leurs pays d’ici à 2050, tandis que l’IOM estime 1 milliard de personnes déplacées d’ici à 2050.


Mais cela ne s’arrête pas là : Comment maintenir la paix entre nous dans un monde où les ressources sont moins accessibles et les espaces vivables sont moins nombreux ? L’accumulation de problèmes sociaux avec d’autres alimente les tensions et les conflits. Ainsi, en renforçant les problèmes sociaux, les crises environnementales sont des catalyseurs de conflits. Certains analystes (par exemple Anès Sinai) ont d’ailleurs identifié pour certains récents conflits des chaînes de causalité composées de conséquences du changement climatique.


Bref, dégrader notre environnement, c’est créer ou renforcer les problèmes sociaux. Et cela peut générer des réactions en chaîne : inondations et sécheresses, perte en rendements agricoles, puis tensions sur l’approvisionnement alimentaire, famines, tensions géopolitiques… Les effets sociaux peuvent ainsi se multiplier vite… et il en est de même pour les crises environnementales.


Un effondrement global de l’environnement peut entraîner un effondrement civilisationnel


Les pressions exercées par l’humanité déstabilisent notre environnement dans son ensemble, qui perd en résilience. Et si ces pressions sont trop fortes, l’environnement peut changer brutalement d’état, ou s’effondrer. Par exemple, concernant le climat, les conséquences du changement climatique pourraient changer de nature et d’ampleur brutalement en dépassant les +2°. On parle de points de bascule qui feraient basculer le climat vers un nouvel état d’équilibre inconnu.


Plus généralement, l’approche scientifique des frontières planétaires propose une décomposition des pressions exercées sur l’environnement en 9 seuils de pression à ne pas dépasser, et à partir desquels l’humanité risque un changement global et brutal du système qu’est l’environnement planétaire. Pour en savoir plus, 2tonnes a publié deux articles qui en parlent : le premier article est sur le donut et la théorie du donut de Kate Raworth. Les frontières planétaires sont décomposées et présentées. Le second article est sur l’importance d’avoir une vision systémique car l’environnement est un système complexe.


Un tel scénario de changement brutal de l’équilibre climatique ou environnemental s’avèrerait probablement catastrophique pour notre civilisation, avec des services écosystémiques vitaux qui pourraient drastiquement réduire, des zones densément peuplées qui pourraient devenir inhabitables, des forêts qui pourraient se transformer en déserts, des zones fertiles qui pourraient devenir incultivables… et rendre la planète inhabitable pour la population mondiale actuelle, voire pour une population beaucoup plus faible par manque d’espaces et de ressources. Autrement dit, risquer un effondrement de notre environnement, c’est risquer un effondrement de notre civilisation.


Nous avons exploré dans cette partie les conséquences sociales des crises environnementales.


Agir pour l’environnement, c’est donc minimiser les conséquences sociales des crises environnementales (et éviter un effondrement civilisationnel). Mais toutes ces conséquences possibles ne s’appliquent pas partout de la même manière… et pour tous et toutes de manière équitable.


Les conséquences des crises écologiques sont injustes.


Les conséquences des crises écologiques s’appliquent injustement aux êtres humains, sous plusieurs aspects.


Pour commencer, les conséquences sont injustes entre les générations. En effet, la dégradation passée de l’environnement génère une dégradation future et durable. Par exemple, les conséquences du changement climatique ne sont pas transitoires, mais durables. Les générations actuelles vivent dans un climat plus difficile que les générations passées. Et les générations futures vivront dans un climat encore plus difficile. Or, les générations futures ne sont pas responsables des émissions de gaz à effet de serre actuelles. Elles vont subir les conséquences des erreurs des générations passées et actuelles.


Puis, la responsabilité des crises écologiques n’est pas uniformément répartie, et cela se comprend facilement à l’échelle internationale : En cumulant les émissions depuis 1850, certains pays ont largement plus contribué à l’intensification de l’effet de serre que d’autres. Or, le changement climatique est planétaire : tout le monde en subit les conséquences. De plus, beaucoup des pays les plus exposés aux aléas climatiques sont des pays peu émetteurs historiquement, ce qui renforce cette injustice.


Il existe d’autres formes d’injustice liées au changement climatique. Par exemple, selon l’ONU, 80% des personnes déplacées à cause du changement climatique sont des femmes. Autre exemple, ce sont les enfants et les femmes enceintes qui sont les plus vulnérables aux canicules.


Bref, la dégradation de l’environnement est ainsi fondamentalement injuste.


Il faut donc préserver l’environnement pour ne pas créer ou renforcer les enjeux sociaux, et notamment ne pas renforcer les inégalités.


Mais agir pour la préservation de l’environnement a-t-il des effets sociaux directs positifs ou négatifs ?


Les co-bénéfices sociaux des actions écologiques


“L’écologie, c’est pour les riches !” En effet, ce sont les plus riches qui contribuent le plus à la dégradation de l’environnement, notamment sur le changement climatique : selon Oxfam, 1% des plus riches émettent autant que ⅔ de l’humanité. Et même en France, on observe des différences importantes entre les ménages les plus pauvres et les plus riches.


Par ailleurs en France, selon un sondage Ifop, 45% des sondés estiment que la protection du pouvoir d’achat et la poursuite d’une politique de transition écologique sont deux objectifs incompatibles.


Et pourtant, c’est bien toute la population qui est concernée par la transition écologique. Mais alors comment faire pour que les actions écologiques aient des co-bénéfices sociaux ?


Peut-on faire de l’écologie d’un côté pour ne pas créer ou renforcer des enjeux sociaux en détruisant l’environnement, sans de l’autre en créer d’autres par les actions que cela implique ? N’est-ce pas une impasse ?


Prenons l’exemple du secteur des transports, premier secteur émetteur en France, et concentrons nous sur un thème central : la voiture !


Moins de voiture pour de nombreux co-bénéfices sociaux !


La voiture représente à elle seule 2tCO2e/personne/an sur les 10tCO2e de l’empreinte carbone moyenne d’un Français. Il est nécessaire de réduire ce poste d’émission ! Et plusieurs leviers ont d’importants co-bénéfices sociaux :


  • La réduction de l’usage de la voiture permet des économies sur de nombreux trajets ! En effet, les transports en commun et la mobilité douce sont très souvent largement moins chers que la voiture qui génère de nombreux postes de coûts (achat, carburant, crédit, entretien, assurance…)


  • La réduction du trafic routier permet de réduire les espaces routiers. Et la voiture est l’une des causes principales de la pollution de l’air. Ainsi, dans les villes, réduire la voiture présente des avantages considérables en termes de qualité de vie. Cela permet d’allouer plus d’espaces à la vie de quartier, aux piétons… de réduire les nuisances sonores et de réduire drastiquement la pollution de l’air. La libération des espaces routiers peut aussi permettre de végétaliser ces espaces pour plus de fraîcheur et moins d'îlots de chaleur lors des canicules.


  • Le développement des transports en commun pour mieux desservir certaines zones urbaines ou rurales facilite le trafic et permet une certaine revitalisation des territoires.


  • L’aménagement du territoire pensé pour réduire les distances entre les espaces de vie (logement, travail, supermarché, école…) permet de réduire le temps passé dans les transports pour plus de temps libre.

Ces actions ont donc des co-bénéfices sur le pouvoir d’achat, la santé, la qualité de vie, la résilience des territoires et l’équité !


L’importance des modalités d’application de ces mesures


Si ces actions ont des co-bénéfices sociaux, elles peuvent avoir des effets négatifs, notamment en créant des inégalités et des injustices. Pour respecter ces enjeux, il faut que ces actions soient appliquées avec équité, et que chacun et chacune puisse faire évoluer sa mobilité en cohérence avec ses besoins et sa situation. Et c’est notamment pour cela que les scénarios prospectifs (Ademe, PTEF, négaWatt) n’envisagent pas d’arrêt total de l’usage de la voiture, mais une diminution (environ -15% de la part modale de la voiture entre aujourd’hui et 2050). La réduction est permise par le développement des transports publics, la mobilité douce et la diminution des trajets. Ceux qui n’ont pas l’opportunité de se reporter sur ces solutions utiliseront toujours la voiture. Ainsi, il n’est pas imposé à tous d’arrêter la voiture, mais des solutions alternatives sont mises en place pour qu’une partie de la population puisse se passer de voiture.


Mais si la voiture reste présente dans le mix des transports 2050, il s’agit de trouver d’autres leviers complémentaires pour réduire son impact. Et il existe diverses solutions pour cela : réduction du poids des véhicules, covoiturage, baisse de la vitesse, écoconduite, électrification… Concernant la voiture électrique, bien qu’elle génère des tensions sur d’autres enjeux environnementaux (en particulier sur l’usage de métaux), les travaux prospectifs proposent notamment de généraliser l’électrification du parc, ce qui permettrait à ceux qui n’ont pas d’alternatives à la voiture de se déplacer moins carboné. Cependant, l’achat d’un véhicule électrique coûte cher aux ménages, et n’est pas accessible à tous. C’est pourquoi il est nécessaire d’accompagner ces ménages à l’achat pour appliquer ce levier de manière équitable et ne laisser personne de côté, par exemple avec des aides financières (primes, bonus-malus…).


Ainsi, pour cet exemple de la voiture, l’application de ces leviers permet de réduire l’impact du secteur tout en proposant des solutions inclusives permettant à chacun d’adopter le transport adapté, et cela permet des co-bénéfices sociaux sur la santé et la qualité de vie !


Des co-bénéfices sociaux pour bon nombre d’actions !


L’exemple de la voiture est généralisable à la plupart des actions : elles peuvent s’appliquer de manière équitable, contribuer à réduire les inégalités et ont des co-bénéfices sociaux. Citons quelques exemples pour illustrer cela.


Toutes les actions qui visent à réduire la combustion d’énergies fossiles permettent de réduire la pollution de l’air par la réduction d’émissions de particules fines. C’est un co-bénéfice pour la santé. Cependant les modalités d’applications sont à penser pour permettre une transformation inclusive qui permette à chacun d’adapter son mode de vie et de trouver des alternatives attractives. Nous avons vu l’exemple de la voiture, mais d’autres exemples existent : réduire le trafic aérien en développant le train et son attractivité (par exemple en réduisant le prix des billets) ; réduire la consommation d’énergie en proposant des systèmes de consommation d’énergie plus efficaces permettant des économies (par exemple des systèmes de chauffage plus efficaces)...


La rénovation thermique des bâtiments, et notamment des logements, permet de lutter contre la précarité énergétique. Selon l’ONPE, 25% des ménages se déclaraient en difficulté pour payer leur facture énergétique en 2021. Rénover, c’est réduire les dépenses courantes des ménages, et une meilleure qualité de vie grâce à plus de confort thermique. Cependant la rénovation est un investissement important, et il est nécessaire pour la rendre accessible à tous d’organiser un système d’aide équitable.


Plus généralement, les mesures de sobriété et d’efficacité énergétique permettent des économies, et de gagner en souveraineté énergétique à l’échelle nationale. Moins d’énergie achetée à des pays fournisseurs, c’est moins de dépendances à ces pays, et un pouvoir géopolitique plus grand.


Des co-bénéfices sociaux dans tous leurs états !


La plupart des actions écologiques permettent d’améliorer la santé et la qualité de vie. Leurs modalités d’application peuvent être conçues de manière équitable. Qu’en est-il d’autres enjeux sociaux comme l’emploi ou le pouvoir d’achat ?


Moins de voitures pour plus d’emplois : comment est-ce possible ?


Certains leviers impliquent des évolutions économiques majeures dans certains secteurs, cela ne va-t-il pas détruire des emplois ?


Reprenons l’exemple de la voiture : La réduction de l’usage de la voiture s’accompagne d’une réduction de la taille du parc automobile et d’une baisse de la vente de véhicules neufs. Le secteur serait touché négativement en termes d’emplois, avec une baisse estimée de 300 000 emplois selon The Shift Project.


Néanmoins, le think tank a réalisé cette étude prospective sur l’emploi l’ensemble des secteurs les plus impactés par la transition écologique (agriculture, construction, transport…) représentant 4M d’emplois, et estime qu’au total les transformations sur ces secteurs vont aboutir à la création de 300 000 emplois. Et cela cache un nombre important de reconversions (800 000 destructions de postes et 1,1M créations).


Préserver notre environnement pour préserver notre portefeuille !


Dans les exemples précédents, nous pouvons remarquer que les actions ne laissent pas notre portefeuille insensible : certaines permettent des économies, d’autres demandent des investissements conséquents. Mais alors finalement, l’écologie nous fait-elle dépenser plus ou moins ?


Pour répondre, permettez-moi d’introduire le triptyque imaginé par négaWatt pour catégoriser les actions écologiques : “sobriété, efficacité, renouvelable”. Le renouvelable consiste à sortir des énergies fossiles et ainsi changer le mix de production d’énergie. L’efficacité consiste à utiliser moins d’énergie pour répondre à des besoins identiques. La sobriété consiste à utiliser moins d’énergie en réduisant les besoins.


Les actions d’efficacité peuvent nécessiter des investissements dans des systèmes efficaces (rénovation, pompe à chaleur, véhicule électrique…). Mais l’efficacité permettra ensuite une réduction importante des dépenses courantes qui rentabilisera en quelques années l’investissement.


Pour les actions de sobriété cependant, il n’y a pas l’ombre d’un doute : elles permettent des économies. Certaines actions de sobriété relèvent du bon sens : éviter les gaspillages alimentaires, arrêter le moteur de son véhicule au feu rouge, éteindre les lumières en sortant d’une pièce. D’autres actions relèvent d’un renoncement à certaines consommations : réduire les trajets en avion et voyager moins loin, manger moins de viande, baisser le chauffage et mettre un pull, acheter moins d’objets neufs… Ces actions peuvent être perçues comme plus difficiles, mais sont souvent d’autant plus efficaces pour réaliser des économies.


Economiser des ressources pour mieux les redistribuer


De nombreuses actions écologiques permettent d’économiser des ressources : économies d’énergies, réduction d’usage des surfaces, économies de matériaux... Les ressources restantes ou libérées peuvent être mieux distribuées. Par exemple, les quantités de produits alimentaires gaspillées dans le monde (17% de la production) pourraient couvrir une grande partie des besoins alimentaires des populations en insécurité alimentaire. Le gaspillage n’étant pas l’apanage des pays les plus riches, une telle mesure peut être appliquée localement.


Autre exemple, la réduction de la production de produits carnés ou d’extractions minières permettrait une importante réduction de la consommation d’eau. Dans les pays les plus secs, où l’approvisionnement en eau des populations les plus pauvres est compromis, cela permettrait de garantir un meilleur accès à l’eau.


Toujours concernant la production de produits carnés, sa réduction libérerait énormément de surfaces dont une partie pourrait tout à fait être alloué à la production d’autres produits alimentaires moins gourmands en espaces, et contribuer à produire plus pour les populations dans le besoin.


Les avantages d’un bon régime


En parlant d’alimentation, parlons régime alimentaire ! Car sous certains aspects, la transition écologique ressemble à un régime. Les humains, et surtout les plus riches, consomment de manière trop abondante, et il serait bon pour eux qu’ils modèrent leur consommation ! Et cette modération bien que difficile à mettre en place peut avoir des co-bénéfices une fois en place :


  • La réduction de la consommation de viande permet des économies car les produits carnés font partie des produits alimentaires les plus chers. Au regard de la consommation de viande actuelle, l’OMS recommande de réduire la consommation de viande pour être en meilleure santé. Il ne s’agit pas nécessairement d’arrêter la viande, mais de la réduire collectivement d’entre 33% et 66% selon les experts de la prospective.


  • La réduction des trajets aériens peut s’accompagner d’un rapport au voyage qui évolue. Il ne s’agit pas nécessairement d’arrêter de voyager, mais de voyager moins et/ou moins loin (pour une baisse du trafic de plusieurs dizaines de %). En termes d’alternatives aux voyages lointains, l’Europe et la France disposent d’une diversité de paysages et de cultures uniques au monde qui offrent de nombreuses possibilités de voyages plus proches.

Ces actions de sobriété sont souvent essentielles pour réduire suffisamment les impacts environnementaux des modes de vie des plus riches. Ce sont donc eux qui ont le plus de marge de manœuvre de sobriété : ce sont souvent les plus riches qui voyagent le plus en avion, ont les factures énergétiques les plus élevées car chauffent des surfaces d’appartement ou de maison plus grandes, achètent plus de biens neufs…


Comme pour les régimes, ce sont les personnes en surpoids qui ont le plus à perdre… où à gagner : une meilleure santé, un meilleur ancrage local, une fierté et un sentiment d’accomplissement et d’alignement… Et peut-être même une opportunité de faire le tri entre le superflu et l’essentiel pour se recentrer sur ce qui contribue le plus à nous épanouir.


En effet, durant les animations d’ateliers 2tonnes, ou d’autres ateliers d’intelligence collective, certains animateurs et animatrices débutent l’atelier avec une question au groupe de participants : “Pouvez-vous partager au groupe 1 activité que vous aimez ou qui vous rend heureux.” Les participants prennent la parole à tour de rôle, sont évoqués passer du temps avec ses proches, apprendre, rigoler, faire l’amour, rêver, écouter de la musique, lire, faire du sport… La plupart de ces activités peuvent se faire avec peu voir pas d’impact destructeur sur l’environnement. La transition écologique ne les remet pas en cause, au contraire, les actions de sobriété permettent en quelque sorte de leur laisser plus de place.


Conclusion


Résumons ! Tout d’abord, la transition écologique est par essence sociale : elle permet de minimiser les conséquences sociales des crises environnementales, ainsi que les inégalités multiples qu’elles génèrent. Puis, l’action écologique a de nombreux co-bénéfices sociaux si elle est bien mise en œuvre : santé, pouvoir d’achat, emplois, équité et réduction des inégalités, mais aussi accès aux ressources !


En d’autres termes, ces actions écologiques aux nombreux co-bénéfices sociaux contribuent à “rentrer dans un donut” : celui de Kate Raworth, proposé par Kate comme boussole pour l’humanité. Il permettrait de nous diriger en tant que civilisation vers un espace sûr et juste pour l’humanité en préservant l’environnement tout en répondant aux enjeux sociaux. Pour faire plus ample connaissance avec ce donut, nous vous invitons à lire notre article à son sujet.


Et pour découvrir plus en profondeur les actions écologiques et se questionner sur leurs co-bénéfices sociaux, nous vous invitons à participer à un atelier 2tonnes ! Il vient d’ailleurs d’être mis à jour récemment, et cette nouvelle version permet de mieux se questionner sur les synergies entre écologie et social. Pour nous, avoir conscience de ces synergies et être capable de faire des liens entre écologie et social est essentiel. Cela permet d’analyser de manière plus large les actions de la transition écologique et de questionner leurs modalités d’application, pour en identifier des modalités vertueuses sur les enjeux sociaux !


Pour finir, par ses nombreux co-bénéfices sociaux, la transition écologique comporte de nombreux atouts pour constituer un projet collectif fédérateur bien plus qu’acceptable mais carrément souhaitable, désirable ! Et c’est cette vision de la transition écologique qui nous inspire et qui nous semble pertinente à transmettre pour donner envie et embarquer ! Et cela fera l’objet de notre prochain article !










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